mercredi 12 mars 2014

Beni Art : le génie de la rue

Peace, love, unity and having fun ! 

Ces mots, cet état d'esprit fabuleusement urbain, collent à la peau de Beni Art. Son cœur bat au rythme du hip hop. Ses mains réalisent des œuvres d'art. Des murs aux corps, Beni Art est un strasbourgeois hyper doué qui impose son style ultra coloré, débordant de mouvements, une véritable explosion de joie de vivre. Beni Art nous fait découvrir l'intensité de son art, son splendide moyen d'expression. A grand coup de crayons, de bombes, de pinceaux et de pas de danse, il nous embarque dans son incroyable univers, étrange mariage entre les mangas et le hip hop, une fabuleuse union pour un style unique, bercé par l'imagination de l'enfance, rythmé par un beat déchaîné.

Beni Art
(Toutes les photos de cet article m'ont été remises par Beni Art)


"Je viens tout juste de rentrer de Nice !" s'exclame Beni Art en s'asseyant à ma table. Sa passion le fait voyager aux quatre coins de la France.
L'histoire d'amour entre ce jeune homme incroyablement talentueux et le dessin remonte à son enfance. "J'ai commencé à dessiner vers 7-8 ans grâce à ma maman qui illustrait mes carnets de poésie. Ça a été un vrai déclic. Depuis, je ne fais que dessiner."
Plus qu'un simple plaisir, un divertissement parmi d'autre, le dessin est pour lui un moyen d'expression : "Je n'aime pas trop parler. Par exemple, quand j'étais petit et que je devais réciter un poème devant un public, ça me faisait peur. J'arrive beaucoup mieux à m'exprimer grâce aux gestes."
S'il s'éloigne alors des mots c'est pour mieux se rapprocher de la danse. Inspiré par Michael Jackson et Pop'N'Taco, il reproduit le moon walk et la wave de ses idoles. "La danse me permet de m'exprimer, de prendre possession de l'espace. C'est un vrai partage entre le public et toi." Cette danse acrobatique, qui tire ses origines de la culture africaine, s'est peu à peu métamorphosée pour devenir, dans les années 70, le break dance porté par James Brown notamment. La danse, plus qu'un art de la grâce, plus qu'une démonstration physique, est un moyen de communication. Les danseurs y voient une façon de se montrer, d'être présent dans le monde, un miroir mouvant de leur personnalité. Et les gestes deviennent peu à peu des mots ...
La danse le fait glisser dans le milieu hip hop au cours des années 90. Il explique : "Il y a une émission sur MTV qui m'avait vraiment marqué à cette époque. Elle expliquait toute la culture hip hop, l'influence d'Afrika Bambaataa et toutes les disciplines réunies par ce mouvement culturel".
Né aux Etats-Unis dans les années 70, le hip hop a émergé dans les quartiers populaires. Poésie, musique, peinture, déclamations, cet art de la rue, créateur d'un style à part entière mais aussi d'une véritable communauté, avec son langage et ses codes, trouve dans les villes sa source d'inspiration et son moyen d'expression. D'une activité ludique à un phénomène sociologique de très grande ampleur, le hip hop a totalement modifié la société, il a pris possession de l'espace publique où il est né, il y impose ses couleurs, ses mouvements, sa vision de la vie.
En 1998, Beni Art a commencé à graffer. Bercé par le hip hop, poussé par son amour du dessin, ce fut naturel pour lui. Son art s'étend sur les murs, il redessine la rue. Dans le gris de la ville, il impose son style, ses couleurs jaillissent sur les surfaces, remplissent l'espace, elles métamorphosent les façades. Le promeneur attentif, au cours de sa marche silencieuse dans les sillons tristement noirs des artères urbaines, sera surpris par ce scintillement franc et joyeux, cette débauche de couleurs, l'intensité magnifique du message porté par les graffitis de Beni Art.
Violet, rouge, vert, noir ou jaune, ce jeune artiste pique à l'arc-en-ciel ses plus belles couleurs pour donner vie à ses œuvres. Ses dessins, toujours en mouvements, paraissent se lover dans les volumes, ils semblent prendre vie. "Le bleu, surtout, est vraiment une couleur qui m'inspire. Le bleu ciel en fait. Il m'inspire l'idée de voyage, de la mer, de la liberté. Le bleu, c'est être dans les nuages et être dans les nuages, c'est être libre." Si son bleu s'inscrit au cœur de la rue, c'est en tant que rêve d'un ailleurs. Il se lit comme l'espoir enfantin d'une liberté pleinement heureuse, le rêve d'un échappatoire solaire et serein. Ce bleu, c'est la présence d'une absence.
"Le dessin, ça me soulage. Ça me permet de penser à autre chose. Je ne pense à rien quand je dessine. Je griffonne de ma main gauche, sans vraiment réfléchir, puis ça vient petit à petit." On sent chez Beni Art cette passion pour le dessin, ce désir et même ce besoin. L'art l'habite, il est sa raison de vivre.
"C'est comme si j'avais deux âmes" déclare-t-il. Il y a Tan, jeune homme gentil et discret, et puis il y a Beni Art, c'est son blaze, qui a sa propre histoire.
Beni Art, c'est surtout un style totalement à part. "Je m'inspire des mangas, de la culture japonaise en fait, et du hip hop, c'est ce qui donne le style Beni Art ! Tout le monde me dit qu'on reconnaît mon style. Le hip hop a fait un boom en France, tout comme le manga d'ailleurs, mais c'est vrai que le mélange des deux est plutôt rare." Par la magie de son talent, par la subtilité de son art, il a réussi à combiner ces deux univers.
"Akira Toriyama, le dessinateur de Dragon Ball Z est vraiment mon maître ! Je l'ai pas mal recopié étant petit. C'est comme ça que tu apprends, tu commences par faire du copié-collé. Tu imites avant de pouvoir toi-même créer." explique Beni Art avant d'ajouter : "Je n'ai jamais pris de cours de dessin, je suis autodidacte."
"Sinon, ce qui m'a aussi beaucoup inspiré, côté manga, ce sont les années 80-90 avec Sailor Moon, Nicky Larson, Saint Seiya ... Côté hip hop, ce sont des graffeurs comme Tilt, Mode2, Fafi ou Miss Van."
"Bien sûr, je viens du milieu hip hop, mais j'ai une culture très personnelle. Par exemple, les lettrages que je fais sont très old school." Beni Art innove, il se laisse porté par ses goûts, par sa magnifique personnalité, par son superbe talent.
"Ce que j'aime vraiment, c'est créer. J'aime créer des formes. Créer des personnages. J'ai tendance à regarder un peu partout. J'observe tout, les formes, les visages, les caractères, ... Tout ce que je vois m'inspire. J'ai besoin de me nourrir constamment, de toujours voir ce qu'il y a autour de moi. Je n'utilise jamais de bloc notes, je garde tout dans ma tête."
C'est vrai que, quand on lui parle, on remarque que ce jeune trentenaire ne peut s'empêcher de regarder tout ce qu'il se passe autour de lui. D'un tempérament très calme et posé, il est pourtant incapable de tenir en place. Ce besoin de tout voir, de se nourrir de ce qui l'entoure, est primordial pour lui.
Beni Art ne vit que pour apprendre toujours plus de choses. Il se lance constamment des défis. Milles et unes idées fourmillent dans son esprit comme autant de petites étincelles artistiques, ses projets se dessinent à toute allure. Quand on discute avec cet incroyable artiste originaire du Cambodge, on réalise qu'il mène une folle course contre le temps, seule barrière à se dresser contre son envie de pouvoir tout faire, tout de suite.
Fan de tatouage, il explique "Beaucoup de personnes s'étonnent que je ne sois pas tatoueur aussi. J'ai déjà crée des motifs pour des tatouages. Le problème, c'est que je ne suis pas patient. Je travaille très rapidement. Mais, cette année, je vais m'y mettre ! Je veux d'abord me former au niveau de l'hygiène, des outils aussi ..."
"J'ai vraiment envie d'apprendre ! J'ai envie de me nourrir ! Je ne veux pas être excellent, être le meilleur, mais je veux qu'on reconnaisse que mon travaille est bon."
Tel un alchimiste des temps modernes, Beni Art transforme tout ce qu'il touche en or. Aucun domaine artistique n'échappe à sa superbe curiosité. "J'aimerais beaucoup me lancer dans la sculpture. Je ne suis pas bricoleur. Faire de la poterie, tout ça, ce n'est pas mon truc. Mais j'ai envie d'aller toujours plus loin. Tous les jours, j'apprends quelque chose de nouveau. Toutes les personnes que je rencontre m'apprennent quelque chose. C'est vraiment très important. Le partage, les échanges, permettent d'apprendre plein de nouvelles choses !"
Beni Art s'est même essayé à la photographie : "J'ai envie de faire quelque chose de nouveau dans la photographie. De regarder les photos avec un œil artistique. Les photos, ça me parle vraiment. Ce que j'aimerais, c'est aller plus loin que la modèle posant sur le fond blanc. J'aimerais qu'elle s'inscrive dans un lieu, qu'elle se fonde dans un décor ... La photo, en fait, c'est comme la peinture. Par exemple, je suis déjà allé voir plein de fois le Radeau de la Méduse au Louvre. Tu peux imaginer plein de trucs avec ce tableau et c'est ça qui me plaît !"
Beni Art est un touche-à-tout. Il se sert de son talent, ce véritable cadeau de la nature, avec brio pour exprimer toute sa personnalité, tout ce qu'il a dans le cœur, pour magnifier les arts de la rue. Si le paysage urbain dans sa totalité est sa source d'inspiration, si les hommes lui transmettent l'envie de peindre, il s'éloigne pourtant de tout réalisme et reste fidèle à son style si personnel, cette marque "Beni Art" qui n'appartient qu'à lui.
Il explique : "Bien sûr, mes dessins sont le reflet de ma personnalité. J'adore l'imagination des enfants ! Les enfants se créent un univers et ils arrivent à le partager avec les autres. J'aime tout ce qui est enfantin, kawaï, mignon quoi. Et c'est ce qui plaît d'ailleurs ! Les gens ont envie de voir quelque chose de différent !"
Beni Art observe le monde avec son propre regard, il le transforme avec ses pinceaux. Et si cet artiste est si connu aujourd'hui, c'est surtout parce qu'il excelle dans le body painting. "Après le papier, la toile ou les murs, j'avais envie de travailler sur un autre support. Ce que j'aime surtout, c'est travailler sur les volumes. J'ai donc commencé le body painting en 2010 et ça marche bien ! Je fais des prestations dans des boîtes de nuit de toute la France, je peins sur des modèles connues ou non. Je tiens d'ailleurs à remercier Marco 93 et Benjamin Legrain que j'ai connu lors d'une expo à Paris. Il y a aussi Alex Hansen bien sûr, le plus grand body painter, qui peint entièrement les modèles, de haut en bas. J'ai collaboré avec lui pour sa marque de peinture."
"Il y a le body writing, le body graffiti ... Je fais quelque chose de différent, une sorte de tatouage imprégné par le manga. Au début, c'était dur de trouver des modèles. Beaucoup de personnes ont refusé avant de finalement revenir vers moi. Pour moi aussi c'était un peu bizarre, je n'avais pas l'habitude de peindre sur des corps ! Tout le monde s'imagine qu'il faut obligatoirement être nu, mais ce n'est pas le cas. On peut très bien peindre un bras seulement. Et non, il n'est pas nécessaire d'être une belle femme ! La beauté est une question de goût de toute façon, chacun a sa propre vision de la beauté. L'important pour moi c'est juste qu'il y ait un volume sur lequel je puisse peindre. Ma démarche est purement artistique."
Le body painting est un art éphémère, une démonstration artistique qui ne dure qu'à travers les photos, seule trace des dessins réalisés par Beni Art : "C'est vrai que je prends 3 à 4 heures pour réaliser ces dessins qui vont finalement s'effacer mais ça ne me dérange pas ! Je sais que, de toute façon, j'aurais un support grâce à la photo. C'est la seule preuve qu'on garde à vie ! Et puis, le plus important, c'est qu'on prenne du plaisir à faire ce qu'on fait. C'est vraiment primordial dans la vie."
Ce passionné a un agenda bien rempli. Boîtes de nuits et modèles le sollicitent énormément. Le petit alsacien s'est fait un grand nom dans le monde du body painting. Artiste freelance, il est inscrit depuis trois ans à la maison des artistes. Il confesse : "Là, c'est vraiment très bien parti ! Mais j'ai quand même dû me battre pendant deux-trois ans. On m'avait prévenu d'ailleurs, c'est le temps qu'il faut pour réussir."
Fort de ses dons et de son style si original, Beni Art a de nombreux projets : body painting, illustrations, mascottes, motifs de tatouages, stickers, .. Sur son site, vous pourrez trouver des badges, mugs, stickers ou vêtements décorés par son style fabuleusement coloré.
Ce danseur qui soutient la Zulu Nation France, une communauté qui regroupe de grands artistes hip hop, évoque un autre projet qui lui tient à coeur : "jusqu'à présent, j'ai toujours dessiné sur du A4. Même sur le A3, j'ai du mal. On m'a fait remarquer dans plusieurs expos que ce serait bien que je fasse de plus grands tableaux. Il va falloir que j'essaye mais, comme je travaille dans ma chambre, j'ai un vrai problème de surface !"
Ce qui étonne aussi, chez Beni Art, c'est son incroyable modestie. "Je n'aime pas le terme d'artiste. Je ne me considère pas comme tel. Ce sont mes parents qui m'ont éduqué ainsi."
Pour ce qui est de son blaze, impossible de savoir quelle est son origine, c'est un secret ! "Très peu de personnes savent pourquoi j'ai Beni Art pour blaze. C'est très personnel."
Discret par sa personnalité, il explose de couleurs par son talent. Cet alsacien est un artiste extraordinaire. La rue, les gens, sont ses terrains de jeu. Tout le monde peut être spectateur de son style où le hip hop danse avec les mangas, où le japonais se mélange à la peinture très américaine du street art. Beni Art, c'est un diamant urbain et coloré.



Le site de Beni Art : 

http://www.beniart.book.fr/

Pages facebook :

https://www.facebook.com/artbenibook?fref=ts

https://www.facebook.com/pages/Please-Paint-Me/308450549195661


Et, pour le plaisir, quelques œuvres de Beni Art :



Chambres décorées par Beni Art


Exemple de pull réalisé par Beni Art













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