mercredi 4 octobre 2017

Helegramy : argentique, pola et nu artistique

J’ai découvert les photographies d’Hélène, ou Helegramy, en me baladant sur Instagram.
J’ai été charmée par la beauté et la douceur de ses œuvres, la délicatesse des couleurs, la poésie de son regard. Elle photographie des femmes, principalement, des corps nus, des fesses, des seins, des dos, des épaules ; des demoiselles en dentelle ou en soie, en robe ou en peignoir ; des demoiselles au naturel, dans l’intime, dans les petits éclats de bonheur du quotidien. Pas la moindre once de vulgarité ou d’érotisme dans ses photos qui, quand je les regarde, me font l’effet d’un rayon de soleil printanier.
Passionnée de Pola, réalisant la plupart de ses photos en argentique, ce fut un grand plaisir pour moi de l’interviewer.


Jelena par Helgramy

La photographie comme un changement de vie



Originaire de Mulhouse, la sémillante jeune femme est venue à Strasbourg en 2006 pour finir ses études. Assez éloignée de l’art, elle se spécialisait dans la chimie. Elle m’explique : 
« A cette époque je n’envisageais pas du tout de me lancer dans la photo. Je me considérais comme une scientifique. C’est quelque chose qui me bloquait, cette vision que j’avais de moi-même. Je ne me considérais pas capable d’adopter une démarche artistique, comme si ce n’était pas fait pour moi. Et puis j’avais d’autres projets alors. »
Pourtant, la photo a toujours été présente dans sa vie : 
« Ma grand-mère est passionnée de photo. Elle a une pièce qui est principalement remplie d’un côté de livres et de l’autre côté d’albums photos. J’aime m’y asseoir et regarder toutes ses images. » 
« Et puis j’ai toujours été cette personne qui ne lâche jamais son petit compact pendant les soirées. J’adore faire plein de clichés de mes amis. Mais ce n’était pas alors dans un but artistique, je voulais juste garder des chouettes souvenirs. » 
Daisy par Helegramy

C’est il y a trois ans qu’Hélène s’est tournée vers la photo avec plus d’intensité : 
« J’avais envie de découvrir de nouvelles choses, des activités qui puissent m’intéresser. Faire plus qu’aller au sport le vendredi soir, tout simplement. Et puis je voulais rencontrer d’autres personnes et je me suis dit que la photo était un bon moyen pour élargir son cercle de connaissances. »
« J’ai commencé par le biais du numérique, j’ai pris des cours à l’Université Populaire. Je me suis également beaucoup renseignée sur la photo, j’ai commencé à me rendre régulièrement à des expos, à lire des livres sur le sujet, à m’intéresser à l’image. » 



Du numérique à l’argentique, en passant par le Polaroid 



Hélène, qui a commencé à s’intéresser à la photographie par le biais du numérique, s’est très vite tournée vers l’argentique. 
« J’ai vite réalisé que pour progresser dans le numérique il fallait forcément passer par de l’informatique et ça ne m’intéresse absolument pas. J’ai compris que j’avais besoin d’aller vers une approche plus concrète. »
« J’aime l’idée de pouvoir m’amuser avec mes photos, les bricoler, les gratter, les découper, faire des transferts, … J’ai découvert dans l’argentique le medium qui me permet de m’épanouir. »
 « Et puis surtout le rendu n'est pas du tout le même, avec l'argentique les clichés ont de l'âme et une vraie texture. Le numérique m'a vite semblé trop propre. »

En outre, Hélène ne s’est pas arrêtée à l’argentique : 
« C’est dans la continuité de l’argentique que je me suis mise au Pola. J’aime le côté un peu old school de ce medium ! » 
Argentique et Polaroïd ne sont toutefois pas utilisés dans le même état d’esprit par l’artiste, qui m’explique : 
« J’apprécie énormément le côté très doux de l’argentique, son coloris pastel, alors que le Pola me séduit par son côté funky ; j’aime en faire des trucs plus rigolos. J’aime le prendre avec moi quand je me promène ; je suis capable de faire plein de photos de fleurs dans Strasbourg… ça fait de jolis marque-pages ! »
« Pendant les séances, j’aime sortir le Pola pour faire des photos un peu décalées, amener un petit grain de folie dans la séance. Ça m’est déjà arrivé de demander à des modèles de sauter ou de secouer la tête dans tous les sens ! J’aime le côté flou qui en ressort. » 
Camille par Helegramy

Une passion pour le nu artistique 



La jeune artiste se laisse ainsi emporter par sa passion pour la photographie. Elle commence par faire des photos de ses amis, pour leurs familles, ce qui lui permet de se faire la main. Elle apprend comment gérer les modèles, les rassurer, les guider. Rapidement, elle a su que c’était un type particulier d’images qui l’intéressait : 
« J’avais dans le coin de la tête l’idée que j’aime les photos de nus. Je savais que c’était ce genre qui me motivait vraiment. »
Jelena par Helegramy
« J’ai demandé à une amie proche que je trouve vraiment très belle si je pouvais la photographier nue ; c’était la toute première séance que j'ai publié en tant qu'Helegramy. Puis très vite, suite à une annonce que j’avais passée, la modèle Jelena Volkov m’a contactée. Dès la première séance qu’on a faite ensemble, les photos étaient hallucinantes ! Jelena m’a beaucoup apporté. » 

Si aujourd’hui les demandes de modèles affluent auprès d’Hélène dont l’agenda est bien rempli, tout au début, l’idée de photographier des personnes nues la stressait un peu. Avant de se lancer derrière l’objectif, elle a eu l’idée de passer devant, de poser déshabillée pour voir ce qu’on ressent. 
« J’ai contacté un photographe que j’admire beaucoup, Chill, et je lui ai expliqué que la photographie de nu m’intéressait. Je lui ai dit que j’avais besoin de comprendre ce que les modèles vivent. En posant pour lui, j’ai réalisé toute l’ampleur du travail, aussi bien du photographe que du modèle. C’était une expérience vraiment enrichissante. Il m’arrive encore d’ailleurs de poser, j’aime participer au travail d’un artiste. » 
Je lui demande d’où lui vient cet intérêt pour le nu, question à laquelle elle m’a avoué ne pas savoir trop quoi répondre. Elle aime ça, c’est tout. Comme on peut aimer les photos de fleurs, les portraits, ou l’urbex. Elle précise tout de même : 
« Le corps humain m’intéresse, c’est pour ça que j’aime la photo de nu. »
« Quand j’ai commencé, je me suis automatiquement dirigée vers le corps féminin parce que c’est celui que je connais le plus, celui que je comprends. Je comprends aussi les sentiments des femmes, j’étais sensible à leur point de vue. »

Chloé par Helegramy

Du naturel 




Je lui demande de me décrire un peu le déroulé de ses séances photo : 

« Je rencontre toujours les modèles avant la séance. On va boire un verre, on parle de photo et très vite on se met à papoter de choses et d’autres, on discute comme des copines et ça sert aussi à mettre la personne en confiance. »
« Le jour de la séance, je viens vers 10 – 11 heures le matin parce que j’aime bien la lumière du jour. Je vais chez la modèle pour qu’elle soit plus à l’aise, j’apporte des croissants ; c’est ce qu’avait fait Chill quand il m’avait photographiée et j’avais adoré ça alors je l’ai copié ! Prendre le petit-déjeuner ensemble ça met une bonne ambiance ! »
« Puis on va faire des photos dans son salon ; je lui demande de s’asseoir sur son canapé, tout simplement. Au début, la modèle est souvent crispée - c’est normal - alors je fais en sorte qu’elle se détende en racontant plein de bêtises et puis après ça se passe tout seul. J’observe aussi les gestes qu’elles font, j’aime les postures naturelles. Je ne dirige que rarement mes modèles et, quand c’est le cas, c’est parce que je souhaite réaliser une image particulière plus graphique. » 

Même si Hélène fait souvent du nu, elle ne demande pas à ce que les modèles se déshabillent à chaque fois. Elles se laissent guider par le moment, par le feeling, le naturel. C’est quelque chose qui prime pour Hélène : le naturel. 
Gali par Helegramy
« Je ne veux pas de lingerie super guindée. Je demande aux filles de porter quelque chose de décontracté, ce qu’elles aiment bien mettre, même si ce sont des sous-vêtements dépareillés ou si c’est un vieux tee-shirt avec des Gremlins dessus ; ça dépend vraiment de la modèle, de sa personnalité, son univers. »
« Je n’aime pas que les modèles soient trop maquillées. D’ailleurs je ne me maquille pas, je ne vois pas pourquoi il faudrait se sentir obligé de le faire. De toute façon, il ne faut pas oublier que c’est de l’argentique : les cernes, on ne les voit pas ! Et si tu n’es pas bien épilée, ça ne se voit pas non plus ! »
« J’ai vraiment la volonté d’une photo au naturel, tout en douceur. Un corps brut sans vulgarité. De toute façon, pour moi, le corps d’un homme ou le corps d’une femme ne sont pas vulgaires. » 
Hélène souligne d’ailleurs que très peu de ses photos ont besoin de cette fameuse censure imposée par des réseaux sociaux comme Instagram qu'Hélène utilise pour se faire connaître : 
« J’aime mieux la délicatesse d’une épaule, d’une hanche, qu’un corps visible en entier. J’apprécie les cadrages serrés. C’est pour ça aussi que j’aime les photos de nus. Si je devais faire un zoom d’un tee-shirt, ça n’aurait pas grand intérêt ! »
J’apprécie particulièrement les cadrages d’Hélène, je trouve fascinante cette façon qu’elle a de photographier un détail d’un certain angle de vue. Elle précise :
« Je ne réfléchis pas au cadrage ; je le fais naturellement, ça vient tout seul. Tu prends plusieurs photos et quand tu trouves un cadrage qui te plaît vraiment, quand tu sens que ça va être canon, alors là tu jubiles ! » 

Daisy par Helegramy


Confiance en soi et body positive 




Hélène fait très attention à ses modèles, elle veille à ce qu’elles se sentent bien. Je lui demande alors si, d’après elle, être photographe femme permet aux demoiselles d’être plus à l’aise : 
« Je pense que oui, les filles se sentent plus en confiance, même si, quand j’ai rencontré Chill et que j’ai fait des photos avec lui, on s’est tout de suite tellement bien entendu que je ne me suis à aucun moment sentie gênée. Mais certaines filles me disent qu’elles trouvent ça plus naturel, que c’est comme « traîner entre gonzesses » ; elles se sentent plus à l’aise et insouciantes que s’il y avait un homme en face. »
« De mon côté, je remarque que je suis de plus en plus détendue. Je suis très à l’aise avec le fait que mes modèles soient nues, on en rigole même ! En fait, je ne comprends plus trop la pudeur. C’est presque devenu quelque chose d’inconcevable pour moi. Je me sentirais plus « nue » si je devais chanter habillée dans un karaoké plutôt que de poser déshabillée. » 
On retrouve ici pleinement la démarche artistique d’Hélène : 
« Je considère le vêtement comme une barrière. À partir du moment où tu te maquilles, que tu choisis une tenue, tu es déjà en train de te déguiser ; on perd de ce naturel que je recherche. » 
Cette recherche de la beauté des corps, sans vêtements ni fards ou retouches, rejoint la pensée body positive. À travers ses photos, elle aide aussi les femmes à s’accepter, à aimer leurs défauts : 
« Si une nana me dit « Je n’aime pas mes poignées d’amour », je les prends exprès en photo. J’aime photographier ce que les modèles n’aiment pas chez elle mais à ma façon, pour qu’elles se trouvent belles, qu’elles soient heureuses en voyant les images. J’aime bien les plis mais c’est sûr que si la nana a un double menton sur une photo, je ne déclenche pas ! On a tous un double menton quand on baisse trop la tête, qu’on fasse du 34 ou du 42. » 
D’ailleurs, quand je lui demande si elle recherche un type particulier de modèle, elle me répond par la négative : 
« Bien au contraire ; je cherche vraiment à varier les profils, les caractères, les ambiances. J’ai pas mal de séances photos de prévues avec plein de femmes très différentes et ça me plaît énormément ! » 
« Pour ce qui est des modèles masculins je ne m'étais pas posée la question jusqu'à maintenant, mais j'ai eu l'occasion de faire une première séance et ça m'a donné envie de continuer. Le point de vue des hommes et leur démarche vers ce genre de photographie m'intéresse, je suis curieuse de voir ce que je pourrais créer avec eux. » 

Vincent par Helegramy



L’échange et la rencontre au cœur de sa démarche photographie 




À travers toute l’interview, certains thèmes se distinguaient nettement comme étant centraux dans la réflexion d’Hélène. Parmi eux, on trouve bien sûr sa passion pour l’analogique, la nudité et le naturel, mais également une envie sincère d’apprendre à connaître de nouvelles personnes. 
« J’ai réalisé que ce que j’aime le plus, en fait, c’est de rencontrer des gens. Pour moi, la photo, c’est du partage. » 
Que ce soit via Instagram, les séances photos ou les formations autour de la photo, Hélène a élargi son réseau et découvert cette belle communauté de passionnés d’image. Mais, plus encore qu’une rencontre, la photographie rime pour Hélène avec un échange sincère : 
« Pour moi, la photo est un duo qui nécessite beaucoup d’échanges ; prendre un cliché sans prendre le temps de connaître un peu mieux le ou la modèle, ça ne m’intéresse pas. J’aime discuter avec eux, voir pourquoi ils et elles font ça, découvrir leurs histoires. Je trouve que c’est réellement épanouissant d’avoir leurs témoignages ; on s’apporte mutuellement quelque chose. Cet échange est précieux. » 
Gali par Helegramy

Lancée depuis peu dans la photo, Hélène y a découvert une passion, un moyen d’exprimer son talent, de s’enrichir par la rencontre de nouvelles personnes. Elle déborde d’envies, d’idées : 
« Je ne suis encore qu’un tout petit bébé de la photo et ça me plaît. Je sais qu’il y a encore tant de choses qui m’attendent ! Ça me plaît énormément ! » 

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